RÉMI, HUTCHI, CANDY...

Les moins de 35 ans, dont je fais partie, sont souvent décrits comme une génération qui n'a pas su trouver ses repères. Les dessins animés japonais de notre enfance, que nous regardions pendant que nos parents concluaient leur entente de divorce, n'ont certainement pas contribué à développer le sens de l'attachement.

Rémi sans famille : le titre dit tout. Orphelin recueilli par un alcoolique qui le vend à un acteur ambulant n'ayant jamais été en règle avec l'Union des Artistes. Après la mort de tous les chiens de Rémi, le singe avec son pseudo-costume du 22e Régiment a pris la relève et s'est tapé une pneumonie fatale.

Candy : orpheline élevée dans une ancienne écurie, l'orphelinat Pony. Passe-temps favori : se réunir entre amis dans un cimetière pour pleurer la mort d'un compagnon.

Belle et Sébastien : la mère de Sébastien n'est pas morte, mais elle a abandonné son fils dans les Pyrénées, au lieu de le laisser sur la Croisette où il aurait pu se faire recueillir par Angelina Jolie qui adopte un orphelin à chaque kilo de botox injecté.

Hutchi le prince orphelin : Non seulement sa mère est morte, mais du moment que cette abeille se fait des amis, il y a toujours une grosse araignée qui vient les bouffer. Ça te ruine un sentiment d'auto-compétence.

Le petit Castor et Tom Sawyer s'ajoutent à la liste des enfants admissibles à une allocation d'orphelin de la Régie des Rentes.

Aucun de ces personnages ne se projetait dans le futur et ne s'imaginait de quoi auraient l'air les soupers du dimanche soir avec ses parents. Le prince Actarus n'a-t-il jamais savouré du Hamburger Helper en compagnie de sa mère ?

• Qu'est-ce que t'as fait cette semaine, mon beau tit-Tatarus en papyrus?

• Maman. Ça fait mille fois que je te demande de m'appeler par mon nom. Rien de spécial... Comme d'habitude... j'ai débarrassé la galaxie de 2 ou 3 vilains. Ah oui ! Hydargos t'a fait dire bonjour avant de mourir dans d'atroces souffrances.

• Tu devrais penser à investir dans l'immobilier au lieu des robots. Ton Goldorak... dès que tu l'as sorti du garage, il valait 50 000 piasses de moins. Sauver la civilisation c'est ben beau, mais ça vaut pas un emploi stable chez Bombardier. Et pis est-ce que finalement l'assurance va rembourser ton astéro-hache ?

Albator, c'est pas suffisant qu'il ait perdu un oeil en voulant sauver sa blonde ? Non monsieur. Tous ses amis ont connu des tragédies comme le meurtre de leurs parents ou la destruction de leur planète natale. Ce qu'ils ont en commun tous les membres d'équipage de l'Atlantis, c'est la nostalgie d'un Paradis Perdu. Clio, l'extra-terrestre aux cheveux bleus, se nourrissait uniquement d'alcool en rappelant que la population de sa planète avait été exterminée par des plantes carnivores. Assez turn off merci.

On imagine la fiche de ces personnages sur le Réseau Contact :

Fille de scientifique assassiné recherche Humanoïde (mélancolie proportionnelle au pessimisme) avec qui partager des plans de vengeance et peut-être plus. Fantôme pogné dans l'ordinateur d'un vaisseau spatial, passez votre chemin.

La chanson thème de Candy avait au moins le mérite de nous rappeler l'importance de l'amitié.

Au pays de Candy
Comme dans tous les pays
On s'amuse on pleure on rit
Il y a des méchants et des gentils

Et pour sortir des moments difficiles
Avoir des amis c'est très utile
Un peu d'astuce, d'espièglerie
C'est la vie de Candy

On ne peut pas en dire autant du thème de Démétan.

Gentil petit Démétan
Gentil petit Démétan
Tu n'as pas de chance
Car la jolie Rénatane
Ta petite camarade
Souvent tu y penses
Est la fille de Kiata
Le méchant seigneur des lacs et des bois
Et ça déchire ton âme
Pauvre petit Démétan

Wo wo wo... ça déchire ton âme... wo minute... il est 7 heures 30 samedi matin début 80, j'ai ma semaine dans le corps moi là : une alerte aux poux, deux films éducatifs de l'ONF, une répétition générale avant la première communion, pis j'ai avalé deux réglettes (une verte et une rose)... ce dont j'ai besoin, c'est relaxer. On me propose une grenouille qui est trop pauvre pour fréquenter l'école du village parce que les tritons ont aboli le programme de prêts et bourses. Démétan est le souffre-douleur de l'étang. Dans cette série, les seuls moments où la grenouille à calotte ne se fait pas maltraiter c'est durant les annonces de Kino-Québec. « Viens jouer dehors. » J'aurais dû écouter ce que mon gouvernement avait à me dire au lieu de m'enfarger dans le fil du clavier Jerrold. C'est peut-être pas mon mélange de Sugar Crisps et de Honey Comb avec du lait au chocolat qui me tombait sur le coeur.

Bien sûr, bien sûr, il y avait aussi Pépin la Bulle, les Barbapapas et l'ourson Colargol qui voulait chanter (conséquence indésirable d'un quicky entre une animatrice de pastorale et un barbu de l'Évangile en papier), ou encore Calimero. Dans le cas du poussin italien, le message est plus subtil. Calimero n'abandonne jamais sa coquille d'oeuf sur la tête. Ce qui ne doit servir que d'objet transitoire acquiert un statut permanent : Calimero restera toujours dans le giron maternel et se croira incapable d'affronter la vie.

Non vraiment, maman, t'aurais pas dû t'émanciper et aller travailler. Tu l'as bien dit, Calimero : « C'est vraiment trop inzuste ! »