MENDOZA DE L’INTÉRIEUR.
Quelques réflexions d’Argentins à propos de la ville de Mendoza.
La classe moyenne.
À Mendoza, personne ne va te dire qu’il est pauvre. Tout le monde fait partie de la classe moyenne. Tu vas dans un quartier de merde et ils te disent : « Non, c’est la classe moyenne, on a la TV ». Ici, il n’y a pas la dignité de la pauvreté, mais plutôt la honte.
L’argent.
Les billets sont usés jusqu’à la fibre du papier pour rappeler à tout le monde qu’il n’y en a pas beaucoup et qu’ils doivent durer le plus longtemps possible. Au comptoir des dépanneurs, la caissière vérifie toujours : « T’aurais pas plus petit. Si je prends ton vingt, il me restera plus de change. » Comme les billets sont vieux, l’argent a toutes sortes d’odeurs : celle de la transpiration, du papier brûlé, des patates frites, des empanadas, d’un oreiller de motel…
Les enfants mendiants.
« Les enfants de la rue à Mendoza sont les mieux habillés du pays et les moins misérables. » Tant mieux, ça fait des meilleures photos.
Le système de santé.
Sur le mur d’un couloir d’hôpital : « Recherche esclave avec diplôme d’infirmière. Se présenter aux ressources humaines. »
À l’hôpital central de Mendoza, les équipement à rayons X ne fonctionnent plus depuis deux mois et 6000 patients patientent ou essaient de trouver l’argent pour aller dans un centre privé. Dans toutes les provinces du pays, c’est chose courante, mais à Mendoza, la plus riche, il est surprenant de savoir qu’une vieille dame, incapable de travailler à cause d’une hernie, a besoin d’un certificat pour adhérer au Plan Chef de Famille et comme elle n’a pas d’argent ne peut pas payer le certificat et quand elle trouve quelqu’un pour lui en prêter on ne lui donne pas le certificat parce que la machine à rayons X est brisée.
Mendoza et l’Argentine.
« Mendoza est ce qui ressemble le plus à cette Amérique que les immigrants sont venus bâtir, parce que la province ressemble à cette Europe qu’ils n’ont pu construire et qu’ils ont abandonnée. Le seul problème de Mendoza est l’Argentine. »
« L’Argentine ne nous donne jamais rien. Tout ce que nous faisons, nous le faisons nous-mêmes. » (un ancien sous-secrétaire du gouvernement de Mendoza)
Le vin.
Mendoza, seulement Mendoza, possède 140 000 hectares de vignes. Le Chili, tout le Chili, en a 105 000. Les autres villes de la province produisent également du vin, de même que les autres provinces qui forment la région de Cuyo.
Le dernier cri en matière de vin argentin est le mythe de l’altitude : plus on cultive en hauteur, meilleur sera le vin. Les régions en altitude se caractérisent par une plus grande amplitude thermique. Ça permet supposément au raisin de se gorger de soleil et d’énergie durant le jour et de se reposer la nuit venue. Tout rejoint l’idée du concentré : la vigne est un camp de concentration où on torture le raisin. Le stress hydrique, provoqué par l’irrigation minimale de la vigne, oblige le fruit à concentrer ses odeurs, ses saveurs et ses couleurs. La technique est la suivante : combattre le raisin pour lui arracher tout ce qu’il cache. L’idéologie viticole dominante (sans doute empruntée à l’un ou l’autre dictateur sud-américain) propose une exploitation maximale du raisin par l’homme. Il n’est pas question de donner au raisin ce dont il a besoin pour l’aider à se développer. Non monsieur. Il faut le priver de presque tout pour le forcer à donner ce qu’il a de meilleur.
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